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Le « pratfall effect », ou le bénéfice de la maladresse

07/07/2021

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Personne n’est parfait, et c’est en soit une très bonne nouvelle. En effet, des études psychologiques démontrent que l’humain, imparfait par nature, préfère les gaffeurs aux élèves modèles et ce, y compris dans le domaine professionnel.

De quoi soulager la pression de l’examen ou de l’entretien d’embauche.

Perfectibilité, synonyme d’humanité

Il la trouve belle, ne peut détourner son regard d’elle, percute un lampadaire. Elle rit, c’est gagné : le début d’une histoire. Ce scénario digne d’une comédie romantique stéréotypée n’est peut-être pas si éloignée de la réalité qu’on ne le pense si l’on en croit les études menées autour du « pratfall effect » (« pratfall » désignant, dans la langue de Shakespeare, une chute sur le postérieur).

En 1966, le psychologue et professeur américain Elliot Aronson mène une série d’expériences qui l’amènent à conclure que la gaffe, la maladresse, peut augmenter le capital sympathie des individus. Malgré ce que nous dicterait notre intuition, renverser le café du recruteur lors de l’entretien d’embauche ne condamne donc pas nécessaire votre candidature.

Bien au contraire : en vous excusant, vous affirmez votre perfectibilité. « Votre gaffe vous humanise », résume le professeur de stratégie Olivier Sibony, et vous place dans le camp des semblables pour votre interlocuteur. La perfection, à l’inverse, peut effrayer, tant elle est anormale. Elle est par essence inhumaine, louche et donc peu attirante.

Paradoxalement donc, la lacune est source de crédibilité. Ne dit-on pas couramment qu’une chose est « trop belle pour être vraie » ? Le concept est tellement vérifié qu’il est aujourd’hui récupéré par le marketing, qui parle de « blemishing effect » (de « blemish » : la tache, le défaut).

Le petit accro dont il est ici question, c’est la mauvaise critique sur le site de notation qui va rendre les dix critiques positives sincères aux yeux de l’internaute. C’est le grain de beauté sur la lèvre de Cindy Crawford qui la distingue des mannequins lisses et « fait tout son charme ». Aujourd’hui, nombreuses sont ainsi les marques et personnalités à se montrer volontairement dans des positions embarrassantes pour se rapprocher de leur public cible et augmenter leur capital sympathie.

Effet Praftfall et effet loupe

Les hommes et femmes politiques ne sont pas en reste et ont depuis longtemps compris la force de la faille assumée [voir encadré]. Mais sur ce point comme sur de nombreuses autres, la différence est profonde entre une culture américaine qui valorise la maladresse si elle est assumée et constitue la première étape d’un rebond, et une culture française pour qui l’infaillible constitue encore un idéal vers lequel il faut tendre.

Malgré cette distinction, le « pratfall effect » ne semble pas dépendre du contexte culturel des personnes concernées.

En revanche, il dépend fortement de la réputation en amont du maladroit. En effet, l’ « effet gaffe » est avant tout un effet loupe, qui accentue l’image a priori que renvoie une personne. Ainsi, la gaffe d’un individu jugé plutôt positivement, sérieux ou doué, rendra celui-ci sympathique car humain ; elle enfoncera au contraire quelqu’un dont on soupçonnait l’incompétence.

Le « pratfall » du président

« La victoire a mille père, mais la défaite est orpheline. » En 1961, le jeune et beau et intelligent John Fitzgerald Kennedy, nouveau chouchou de l’Amérique, vient à peine d’arriver au pouvoir qu’il subit un revers aussi stratégique qu’incontestable à Cuba. De quoi entacher a priori son aura et donner du grain à moudre ceux qui, s’appuyant sur son jeune âge, ne l’estime pas à la hauteur de son rôle. Loin de se laisser abattre, JFK surprend en adressant à la population une allocution télévisée dans laquelle il reconnaît son erreur et en assume l’entière responsabilité. C’est cette maturité, plus que l’échec initial, que les Américains retiennent et la popularité du nouveau président explose. Aujourd’hui, cet épisode constitue l’exemple type du « pratfall effect ». D’autres, comme le Professeur Peter Salovey, citent également Bill Clinton, dont le « fardeau Levinsky » fut nettement plus léger lorsqu’il fut assumé. Aujourd’hui, il est l’ex-président préféré des Américains, au coude-à-coude avec Barack Obama.

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