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Le X en manque de diplômes

01/06/2021

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Le secteur de la pornographie, c’est un ensemble de petites entreprises qui ne connaissent pas la crise. Porté par une banalisation de son contenu et la diversification de sa cible, il engrange des chiffres d’affaire (22 milliards d’euros en 2018) à faire pâlir de jalousie n’importe quelle industrie plus traditionnelle.

Aujourd’hui, le « porno » aspire à s’inscrire dans le cercle des secteurs qui comptent et attirent les nouveaux talents. Car malgré sa santé insolente et ses solides arguments, il peine à séduire les candidats. 

Le X, c’est chic

Fini le temps où revues et cassettes érotiques s’acquéraient « sous le manteau » ; le porno tombe l’imperméable et se consomme au grand jour. Dépassée également cette image d’Epinal faisant du consommateur un homme d’âge mûr au célibat persistant.  Déculpabilisées par le succès tonitruant des sagas littéraires coquines (125 millions d’exemplaires dans le monde, dont plus de 7 millions en France, pour 50 Nuances de Grey), les femmes s’invitent à la fête. D’où un changement de cible pour les professionnels du secteur, désormais contraints de prendre en compte les attentes d’une clientèle plus jeune et plus féminine.

Pour illustrer cette transformation, l’institut de référence IFOP une grande enquête portant sur les habitudes de consommation érotique en ligne des Français.

* Première conclusion : malgré une baisse drastique des ventes de revues et vidéos spécialisées, la consommation de produits érotiques se banalise avec l’avènement d’internet. Il y a tout juste dix ans, 17 % des internautes reconnaissaient avoir déjà visité un site x ; ils étaient plus du double (39 %) quatre ans plus tard et sont 60 % aujourd’hui. Près du quart (24 %) de ces derniers avouent regarder des contenus érotiques au moins une fois par semaine.

Le profil type du pornophage évolue lui aussi. Si une grosse majorité reste de sexe masculin, les femmes connaissent une augmentation sensible de leur consommation. Ainsi, en dix ans, la part d’homme ayant déjà consommé du porno sur internet a été multipliée par 2,5 (passant de 30 à 79 %), alors qu’elle a dans le même temps plus que quadruplé chez les femmes (4 % contre 41 %).

Il est amusant de constater que le mariage n’a pas du tout la même incidence chez les deux catégories : s’il réduit la tendance au porno chez les hommes (49 % des célibataires en consomment contre 29 % des hommes mariés), il semble motiver les femmes (3 % des célibataires contre 10 % des femmes mariées). Précisons tout de même, pour la crédibilité des résultats, que l’enquête fut menée en ligne, de manière tout à fait anonyme.

Le net comme nouveau terrain de jeu

Alors qu’il participe activement au dynamisme économique du pays et crée de l’emploi, le secteur du x n’a jamais pu compter que sur lui-même. Imaginez un peu un ministre de la culture souhaitant augmenter les aides au secteur pornographique pour consolider sa croissance : voilà qui ferait @désordre et ne manquerait pas de décrédibiliser le politicien concerné.

C’est pourquoi les entreprises du milieu ont toujours fait preuve d’autonomie et de souplesse.

Bien que dominée par quelques gros noms, l’industrie du X se compose essentiellement d’un  réseau de très petites start-up qui puisent leur raison d’être dans leur inventivité. Du livre de poche à la VHS, elle a toujours accompagné (et favorisé) l’émergence de nouveaux médias et c’est donc tout naturellement qu’elle surfe aujourd’hui les vagues des produits verts et du « tout connecté ». 

Mais c’est sur la toile que se déroule aujourd’hui la grande bataille du X. Rien de plus simple que de créer un site web et d’y poster des contenus faits maison, d’autant plus que les consommateurs plébiscitent de plus en plus les contenus « artisanaux ».

Le porno fait donc figure d’Eldorado pour les entrepreneurs qui souhaitent leur part du jackpot (aux Etats-Unis, le porno sur internet génère onze milliards de dollars par heure). En résulte une explosion de l’offre. Malgré l’étonnante pudeur de l’industrie sur le terrain des chiffres, des études estiment que 12 % des sites existants sont de nature pornographique. La légende veut ainsi que YouPorn soit entré, moins de trois ans après son lancement, dans le club des 50 sites les plus fréquentés au monde. Le défi actuel est donc tout trouvé : gagner la guerre du net et, pour ce faire, se doter des meilleures armes –les développeurs.

Le geek : mâle @lpha

Surprise : le développeur informatique/ingénieur est donc le nouveau profil sexy de l’industrie pornographique, celui auquel il convient de faire les yeux doux et pour lequel redoubler de charme. Il est en effet le seul susceptible de répondre aux trois enjeux posés aujourd’hui aux professionnels de l’industrie :

Ø  Le développement des nouvelles technologies. Anticiper les tendances pour ne pas se retrouver à la traîne, innover pour surprendre le public et faire le buzz… Le porno ne s’interdit rien en termes de recherches et développement. Et avoir le plus gros (budget) n’est pas forcément synonyme de performances : l’inventivité prime ! 

Ø  La protection des droits d’auteur. Sur le net, tout se pique et tout se copie. Il est donc possible de trouver une même vidéo sur de très nombreux sites. Peu désireux de d’emmener ses histoires dans l’enceinte des tribunaux, les producteurs de contenus s’adaptent en misant sur de nouvelles offres comme le live, le chat ou le show personnalisé, qui nécessitent une adaptation technique. Ils doivent également sécuriser la monétisation de leurs vidéos, à l’heure où le contenu gratuit domine la toile.

Ø  La lutte contre le piratage. C’est la problématique clef, celle dont dépend le chiffre d’affaire d’une plateforme. Saturé d’offre, le client se tournera vers le site qui lui inspire le plus confiance ; il s’agit de ne pas laisser traîner ses coordonnées personnelles et bancaires n’importe où. La capacité des sites à protéger les données recueillies est prioritaire  et stratégique. En février 2012, ce sont 6000 adresses mail qui ont ainsi été piraté chez YouPorn et affiché publiquement sur la toile.

Les pages pornos sont également des nids à malwares (virus informatiques), ce qui explique que l’absence de pop-up soit citée parmi les premiers critères de confiance des visiteurs.

L’industrie soigne donc tout particulier le recrutement de ces hauts diplômés, qu’ils soient développeurs, ingénieurs, juristes ou spécialistes en marketing.  A eux de d’analyser l’audience, développer les fonctionnalités, optimiser le référencement, améliorer l’ergonomie des pages… en bref, de faire venir et revenir l’internaute pour convertir ce trafic en revenus. Malgré cet alléchant programme, le secteur peine souvent à recruter des profils à la hauteur des enjeux ; lesté par sa réputation, le X n’est jamais le premier choix des diplômés des grandes écoles.

Une situation que les professionnels du secteur espèrent voir évoluer en même temps que leur clientèle.

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