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« Les RDV de Grenelle », 3ème chapitre : une communication bien huilée

14/03/2018

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Mardi 13 mars se déroulait au ministère du Travail la conférence de presse de Muriel Pénicaud, accompagnée et précédée au micro par trois intervenants. Si le sujet officiel en était « La situation du marché du travail au 4ème trimestre 2017 », tout était savamment orchestré pour nous amener à une révélation : la réforme de la formation professionnelle sera déterminante.

Si tous les chemins mènent à Rome, toutes les déclarations entendues au 3ème Grenelle du Travail mènent à la réforme de la formation professionnelle. Rien n’interdit de croire au hasard, ni à un exercice bien préparé. Quoi qu’il en soit, tâchons de relever ce qu’il s’est passé de positif en 2017 avant d’analyser la communication bien maîtriser de tous les intervenants (Selma Mahfouz, Mathilde Lemoine, Patrick Artus et la ministre en personne, Muriel Pénicaud).

Les bonnes nouvelles de 2017

Le PIB a augmenté de 2%, avec la création de 268 000 emplois, ce qui constitue la plus forte hausse depuis dix ans. Avec le retour en forme du secteur de la construction (+ 30 000 emplois), après dix ans en berne puisqu’il avait vu ses effectifs se réduire de 220 000 personnes depuis 2008.

Ce que les intervenants et la ministre du Travail appellent « la qualité de l’emploi » a augmenté l’année dernière : + 14,5 % de CDI et – 0,5% de personnes en sous-emploi (souhaitant travailler plus).

Le chômage a baissé chez les jeunes (-2,8 points) tout comme le chômage de longue durée (ndlr : supérieur à 1 an). Sachant que ce dernier compte pour les 3/4 du taux de chômage, c’est une dynamique à entretenir coûte que coûte ! Et lorsque l’on sait que ce fameux chômage de longue durée est souvent important chez les jeunes, l’importance de cette donnée double. Et oui, tout est lié ! Une preuve ? Le taux de chômage global a baissé de 1,7 point (- 298 000 chômeurs).

Les embauches freinées par un problème de compétences

Malgré la reprise de l’emploi en 2017, il reste quelques points à régler. Notamment la difficulté des entreprises à trouver le bon profil. Car il ne s’agit pas toujours d’un problème de moyens financiers, de lois ou structure du marché de l’emploi français mais parfois de compétences des candidats, tout simplement. 32% des entreprises citent le « manque de main-d’œuvre compétente » comme obstacle à l’embauche. En résumé, la demande ne correspond pas à l’offre. D’où la nécessité de revoir… la formation professionnelle ! Faire en sorte que les personnes à la recherche d’un emploi - qu’elles soient inactives ou désirant changer de travail - correspondent davantage aux besoins des entreprises et viennent pourvoir les postes libres.

Toutefois, Mathilde Lemoine s’est empressée de souligner la nécessite de « sortir d’une logique adéquationniste ». C’est-à-dire de ne pas axer toute la politique en fonction des besoins et envies des patrons mais de voir les choses de façon plus générale. De penser à la valeur créée pour la France, avec les nouvelles compétences et la transversalité accrue des salariés. Du bon sens qui fait ici place à une vision sur le long terme, en contradiction avec l’habitude de privilégier le court-terme. De prendre ce qu’il y a à prendre, tout de suite et maintenant, puis d’aviser au coup par coup… Sa volonté ? Penser à la mobilité des salariés, laquelle profitera forcément aux entreprises, tôt ou tard. Et donc au PIB, et à la France. CQFD.

Anticiper, changer, s’adapter : il faut évoluer

Une conviction appuyée sur des études menées par l’OCDE. Tandis que les salariés suivant des formations régulières se retrouvent moins souvent au chômage, les entreprises n’investissant pas ou peu dans l’humain ont plus de chance de faire faillite. Conclusion : il faut agir en amont et comprendre qu’il s’agit d’un donnant-donnant. Développer le savoir, la valeur des actifs français. Et donc la compétitivité de la France, à terme, en changeant de paradigme : exporter des produits et biens chers, pour augmenter parallèlement nos capacités d’importation.  Et « sortir d’une logique moins-disante ». Une vision ambitieuse et alléchante, reste à voir si la France y arrivera… Autre argument mis en avant : la différence entre les actifs se fait principalement sur la capacité à s’adapter, à ne pas se restreindre à des tâches répétitives.

Ce qui nous ramène à deux concepts déjà maintes fois entendus : souplesse et productivité. Plus vous êtes polyvalent, plus vous serez utile et productif. Et en termes de productivité, les « seniors » sont souvent montrés du doigt. Toujours selon Mathilde Lemoine, et des études de l’OCDE, si la productivité baisse inévitablement en fonction de l’âge, elle le fait de façon encore plus importante en France qu’ailleurs. Pourquoi ? Car les plus de 45 ans y accèdent difficilement à la formation professionnelle. Il faut donc donner à tous le même droit à la formation, diplômés ou non, et le Compte Personnel de Formation fut cité. Encore une fois, nous étions revenus au sujet central cher à Muriel Pénicaud : la réforme de la formation professionnelle.

Plus de pouvoirs et de responsabilités confiés aux entreprises

Autre positionnement de la professeure à Sciences Po (et membre, entre autre, du Haut Conseil des Finances Publiques) sortant des habituels refrains : « Le coût du travail n’explique pas tout, le taux de chômage élevé et la compétitivité à l’export. » Elle insiste à nouveau sur le besoin de varier, renforcer, développer les compétences des salariés français ; et plus particulièrement des jeunes (15-29 ans). Car une part importante d’entre eux (14,7%, soit 1,7M en 2015 selon une étude de la DARES) sort du système scolaire sans rien et se retrouve sans emploi ni formation – appelés dans le jargon les « NEET » : Neither in Employment, Education or Training. Former, encore former, toujours former : voilà le combat à mener. Comment ? En créant de nouveaux Centre de Formation des Apprentis (CFA), y compris dans certaines régions délaissées (Hauts-de-France, PACA…) qui peinent à inverser leur taux de chômage depuis 1982. Un combat pour l’emploi qui passerait aussi par une amélioration de l’aménagement du territoire, du tissu économique.

Avec la volonté de donner plus de pouvoir aux branches et aux professionnels locaux, supposés mieux connaître les besoins ici ou là que l’Etat voire la région. Mais plus de pouvoir équivaut également à plus de responsabilités comme l’a souligné la ministre du Travail : « Les entreprises ne sont pas que consommatrices de compétences mais aussi co-constructrices ». Des attentes qu’elle espère voir comblées début 2019, qu’il s’agisse de former aux nouveaux métiers du numérique comme à ceux en voie de disparition mais toujours aussi nécessaires (couvreur, boucher…), quelques mois après une certaine loi attendue à l’été 2018. Un clin d’œil à la réforme de la formation professionnelle menée par… Muriel Pénicaud en personne. On n’est jamais si bien servi que par soi-même.

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